En Espagne, les lieux où l’on peut consommer et se fournir en cannabis de manière licite ont été créés par les citoyens eux-mêmes. Au cours des années, les mobilisations sociales « bottom-up » (de la base vers le haut) ont permis l’existence actuelle de milliers de Cannabis Social Club dans le pays. A ce jour, ces organisations sociales privilégient un domaine nouveau et nécessaire dans la culture entourant le cannabis : le féminisme.

Que vous soyez un homme ou une femme, qui parmi vous pourrait affirmer qu’il/elle n’a jamais ressenti ou seulement remarqué au moins une fois l’atmosphère indéniablement masculine de presque tous les rassemblements ou évènements culturels cannabiques ? Les femmes qui ne viendraient pas avec « leur moitié », ou qui ne seraient pas employées pour vendre des produits en portant de la lingerie fine, se font discrètes ou sont absentes. Toutefois, les filles fument, cultivent et aiment également le cannabis… Simplement elles trouvent difficilement leur place dans cette ambiance masculine caractérisant la communauté des usagers de chanvre.

C’est la raison pourquoi certaines femmes cannactivistes de la ville espagnole de Barcelone ont amorcé une initiative majeure – faisant inconsciemment écho à la récente résolution de l’Assemblée Générale de l’ONU au Sommet Mondial sur les Drogues réclamant des approches davantage ciblées sur les genres – en s’associant avec d’autres femmes provenant d’autres régions, partageant les savoirs et en créant le début d’un réseau de cannactivisme spécifiquement féminin.

Leur but n’est pas seulement de réclamer des réformes, ou de réclamer des réformes tenant compte des différents genres ; il n’est pas uniquement de gagner en liberté, en santé, ou de devenir autonomes, mais aussi – et de manière plus importante – d’être pro-actives dans l’actuelle communauté semi-légale afin d’y faire entrer les thèmes féminins soulevés dans des activités liées au cannabis :

  • Nous sommes des femmes.
  • Nous faisons partie d’un secteur en pleine expansion depuis les années 90.
  • Nous sommes des activistes du mouvement cannabique.
  • Nous sommes les fondatrices d’associations, de clubs et de groupes d’entraide.
  • Nous sommes des communicantes, des journalistes, des économistes, des médecins, des femmes d’affaires, des scientifiques.
  • Nous sommes. Nous existons. Nous voulons avoir de l’influence, participer, nous rendre visibles et contribuer au changement.
  • Nous sommes les femmes du mouvement cannabique.

L’idée avait surgi il y a quelques années parmi une des fédérations des Cannabis Social Club de la région catalane en Espagne, la CatFAC. Les Cannabis Social Clubs sont des organisations sans but lucratif qui cultivent du cannabis pour leurs membres (les CSC ayant entre une douzaine et quelques centaines de membres), qui mettent généralement à disposition un local de distribution et une pièce où l’on peut consommer.

Les militantes Catalanes s’unissent pour faire valoir leurs voix

Leur nombre s’est considérablement accru depuis 2007, surtout en Catalogne, toujours à l’initiative de la société civile, et toujours à l’aide d’une organisation interne solide ainsi qu’un fort engagement commun des fédérations de ces Clubs, en dialogue constant avec les autorités.

En 2015, la fédération CatFAC a créé un groupe de discussion entre femmes pour parler des problèmes rencontrés dans les Cannabis Social Clubs, et comment ils pouvaient être résolus.

Le site web mentionne qu’il «est conçu pour que les femmes partagent leurs préoccupations communes, basées sur des activités récréatives». Rapidement toutefois, elles ont mis en évidence le déficit de représentations féminines dans la communauté du chanvre élargie et dans le monde du cannabis en général, et elles ont commencé à oeuvrer pour étendre leurs objectifs.

Finalement, en mars 2016, elles ont organisé une présentation publique dans le Musée du Hachisch à Barcelone, où elles ont lancé un appel pour la création d’un « Réseau National des Femmes Antiprohibitionnistes » au delà des seules utilisatrices et cultivatrices, et ont défini 5 objectifs sur lesquels elles travaillaient depuis longtemps lors des différents rassemblements liées à l’activité du cannabis:

  • Créer des réunions horizontales permettant la mise en place d’un réseau inter-affilié de femmes en relation avec l’industrie cannabique ou à la réforme des lois sur le cannabis en Espagne.
  • Promouvoir la discussion et l’analyse collective de la situation des femmes dans les domaines liés au cannabis, identifier les perspectives et les enjeux de la participation active des femmes dans ce secteur.
  • Promouvoir une meilleure cohésion parmi les femmes actives dans le domaine du cannabis et de la réforme des lois sur le cannabis, en tant qu’utilisatrices, activistes et spécialistes dans divers domaines.
  • Augmenter la présence des femmes dans les associations, les entreprises, le secteur public et politique relatifs au cannabis.
  • Accroître la participation des femmes dans les instances décisionnaires des organisations, associations et entreprises.

Espérons que la graine qu’elles viennent de planter poussera et amènera une floraison de nouvelles senteurs dans la communauté militante, en Espagne et à l’étranger.

Article traduit de l’anglais depuis : Spanish Group Forms to Strengthen Women’s Voice in Cannabis Industry (Leafly).