A l’heure où pleuvent les analyses et les opinions sur la toute récente légalisation et régulation du commerce de l’herbe au USA (état du Colorado), sur les pistes et perspectives ouvertes un peu partout dans le monde sur ce même sujet (Uruguay, Suisse, Pas-Bas, Portugal, République Tchèque, ville de Mexico, état américain de Washington…), il semble que la situation pour la France, où subsiste une prohibition ravageuse et criminogène, impose une petite remise à niveau concernant l’actuel marché (qui existe, même illicitement) du Cannabis, développé sur tout le territoire, et pas uniquement dans les cités périurbaines.

Un article à savourer en 3 volets :

  1. HORS D’ŒUVRE — Une série de reportages sonores sur la vente de shit en France. ACCÉDER DIRECTEMENT
  2. PLAT PRINCIPAL — Une analyse socio-économique du marché souterrain du cannabis (essentiellement de la résine de fleurs de chanvre : « hash » ou « shit »).  ACCÉDER DIRECTEMENT
  3. DESSERT — Un débat tout neuf sur France Inter le 16/01/14 . ACCÉDER DIRECTEMENT

 

 

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HORS D’ŒUVRE

Une petite série de web-reportages, pour s’ouvrir l’appétit, avant d’attaquer le vif du sujet dans la 2ème partie…

AU CHARBON. Samir supervise la vente de cannabis dans une cité du Plan d’Aou, quartiers nord de Marseille. Il vérifie que les choufs (guetteurs) sont en place, que les rabatteurs dirigent le client vers le point de vente, que le charbonneur (vendeur) ait la marchandise suffisante. Le réseau du deal de shit fonctionne comme une entreprise avec sa hiérarchie, ses fonctions et ses horaires. A la tranche de 11h-18h succède celle de 18h-minuit, celle de Samir. Confession crue face à la mer.

SHIT VILLE. Le débat sur le cannabis est marqué par la figure repoussante du dealer. Pourtant, 5 millions de consommateurs doivent bien se fournir quelque part. Dealer pour rendre service, ou pour se sentir moins seul ?

CSC BARCELONAIS. Allô l’Europe, France Inter du 16 janvier 2014 : « Barcelone, nouvelle capitale européenne du Cannabis ? »

Cliquez ici pour réécouter l’émission

 

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PLAT PRINCIPAL

Analyse de MARTINE AUDRAS, économiste, lors du débat « Légalisation du cannabis, sortir de l’hypocrisie » le 7 Mars 2013 à la Maison de quartier de Bagatelle (Toulouse).

Intervention basée sur des études de 1998 et 2005 pour OFDT l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies réalisées par Pierre Kopp, professeur de sciences économiques à l’Université de Panthéon-Sorbonne (Paris I) et chercheur au Centre d’Économie de la Sorbonne, Philippe Fenoglio maître de conférences à Strasbourg et Christian Ben Lakhdar enseignant chercheur à la Faculté catholique de Lille.
Drogues licites/drogues illicites : Les drogues du Nord (Tabac, Alcool) sont autorisées, celles du Sud (à base de marijuana ou de coca ou de pavot) ne le sont pas. La prohibition du cannabis s’appuie sur du racisme.
La prohibition est une aubaine pour les truands. Les problèmes liés à la prohibition sont supérieurs à ceux liés à la consommation.

 

     1.     Le coût économique et social des drogues licites et illicites : les plus chères ne sont pas celles que l’on pense !

Etude faite en 1998 améliorée en 2005 avec enquêtes auprès des ministères…
Coûts privés (mortalité et décès prématuré, perte productivité dans les entreprises, coûts pour les assurances etc… ) et dépenses
publiques (Santé, Répression, Pertes de prélèvements obligatoires dues à la mortalité et aux hospitalisations, Prévention).

Le coût par habitant en France du cannabis est de 15 euros en 2005 dont 57% porte sur la répression et 28% sur la perte de productivité. Selon Christian Ben Ladhkar, ce sont 524 millions de euros qui sont consacrés à la répression du cannabis (Police et Gendarmerie 343 millions d’euros – Douanes 55 millions d’euros – Justice 125,1 millions d’euros) et pourraient être utilisées à une lutte contre les mauvais usages. De plus, la prohibition a un impact important sur la surpopulation carcérale : en France en 2003, 8% de la population pénitentiaire contre 23% en 1995 (5.197 personnes sur 51.827 détenus) l’étaient pour infraction à la législation sur les stupéfiants. En moyenne 68,6% de ceux-ci le sont pour trafic de cannabis.

En 2003, le coût annuel par habitant de l’alcool lui est 40 fois supérieur (600 euros dont 18,% sur la Santé et 43,4 % perte de productivité) et celui du tabac 52 fois supérieur (773 euros dont 38,2% sur la Santé et 38 % perte de productivité).

Un fumeur (14 millions de fumeurs en France) coûte 4,5 fois plus cher qu’un consommateur de cannabis (1,2 millions pour 13,4 millions qui ont essayé une fois dans leur vie) et un alcoolique (5 millions d’alcooliques en France) 9,7 fois plus cher qu’un consommateur de cannabis. Toutefois un consommateur de cannabis est souvent aussi un fumeur…

Le cout social des drogues en France

 

     2.     Le marché noir du cannabis est un marché très capitaliste
Le rapport pour l’OFDT (Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies) de novembre 2007 de l’économiste Christian Ben Lakhdar, citant des travaux du milieu des années 90, précise d’emblée que : « la conclusion majeure à laquelle  aboutissent ces travaux est que l’économie de la drogue dans ces quartiers ne constitue qu’une économie de subsistance où l’enrichissement important individuel et l’enrichissement collectif (au niveau du quartier) ne sont en fait que des idées préconçues ».
Marché annuel en France : 186 à 203 tonnes pour 550.000 usagers journaliers et 1,2 million de personnes qui fume environ 10 fois par mois).

  • Le semi-grossiste gagnerait annuellement entre 253 k€ (138 kilos de cannabis) et 552k€ (302 kilos de cannabis) et leur nombre serait faible : entre 690 et 1.500.
  • Le premier intermédiaire, entre 6.000 et 13.000 personnes, profiterait aussi largement de ce commerce et son bénéfice s’étalerait de 35.000 et 77.000 euros par an. Chacun écoulerait entre 16 et 35 kilos par an.
  • En revanche, les derniers échelons sont nombreux (entre 58.000 et 127.000) et ne gagneraient que de 4.500€ à 10.000 € par an. Toutefois dans les quartiers, 10.000 euros de plus dans l’année est loin d’être négligeable. D’autant qu’il y a diversification de l’offre vers d’autres drogues et donc d’autres ressources.

Selon l’économiste Pierre Kopp, en France, la légalisation du cannabis pourrait rapporter jusqu’à 1 milliard d’euros à l’Etat. Cela
peut se faire à travers l’instauration d’un système de taxation fixé par l’Etat français, qui accompagnerait une éventuelle autorisation de vente du cannabis. La ville d’Oakland, en Californie, a autorisé le 20 juillet 2010 la production d’importantes quantités de cannabis et touche une taxe de 4% sur le cannabis médical (1,1 millions de dollars de recettes). En Californie aux Etats-Unis, la vente de cannabis thérapeutique est légalisée depuis 1996. La vente de la marijuana médicale est taxée à hauteur de 4%.

 

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DESSERT

Preuve que les français sont quand même curieux à ce sujet, la régulation du Chanvre, et à l’impact de sa consommation dans le pays, l’émission Service Public du jeudi 14 janvier 2014 s’est penchée sur la question :

L’herbe qui fait rire, le shit, la beu enfin bref vous m’avez compris est désormais licite dans plusieurs états américains. Le mouvement semble enclenché : la question de la dépénalisation du cannabis, pour des raisons thérapeutiques ou pas, est en train de s’imposer dans le débat public. Faut il la redouter ?

avec :
– Maître Eolas, avocat blogueur
– Jérôme Pierrat, journaliste indépendant et écrivain spécialiste en crime organisé et grand banditisme, dernier livre « Parrains de cité : enquête sur les millionnaires du cannabis » ed. La manufacture de livre.
– Docteur Amine Benyamina, psychiatre, addictologue à l’hôpital Paul Brousse de Villejuif

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