Nantes, le 24 décembre 2017

Réunis exceptionnellement ce 24 décembre, jour du réveillon, nous constatons avec gravité qu’une perquisition a été menée hier à l’hôpital Saint-Jacques de Nantes afin de mettre en évidence un supposé trafic de stupéfiants au sein de l’établissement.

Dans une communication récente, le compte Twitter de la Police Nationale 44 déclare que 24 policiers ont été mobilisés, que deux chiens de la police nationale ont participé à l’action policière pour finalement ne trouver que 7 grammes de résine de cannabis dans la chambre d’un patient.

Dans un établissement ayant vocation à accueillir des usagers en situation de faiblesse, nous considérons qu’une telle perquisition ne devait être menée. L’hôpital est censé être un havre de paix sociale où les individus pris en charge ne peuvent être mis en cause par la police. La santé publique n’est pas un accessoire de la répression, elle doit être au cœur de la prise en charge de nos citoyens. Si l’hôpital échoue à accompagner les patients, il ne faut pas lutter contre le trafic : il faut changer les pratiques, donner plus de moyens, renforcer l’accompagnement et la prise en charge psychologique.

Nous sommes profondément solidaires des patients injustement mis en cause, troublés par cette intervention policière : en témoignent les nombreux messages que nous avons reçu ce samedi.

Nous condamnons avec fermeté l’emploi de l’expression « Opération de sécurisation » profondément infondée et inacceptable au regard des dangers réels constatés.

L’hôpital Saint-Jacques connaît des difficultés, et nous partageons avec le personnel de santé les inquiétudes et la crainte de voir se proliférer un trafic de nature à remettre en cause l’ordre public local.

Mais nous disons dans le même temps que la réponse policière et pénale n’est pas la solution, qu’elle renforce le désordre social, accentue la discrimination à l’égard des patients et contribue à stigmatiser des citoyens déjà lourdement condamnés par la vie.

Nous exigeons ce jour que toutes les informations concernant cette perquisition soient rendues publiques. L’Hôpital n’a pas vocation à « collaborer » avec les forces de l’ordre de cette manière. Un chien de la police n’a pas à se retrouver dans la chambre d’un patient d’hôpital.

Nous mettons en cause la responsabilité de la Direction de l’Hôpital et rappelons les principes essentiels de l’Etat de droit, notamment la nécessité d’une réponse proportionnée et adaptée. Si les responsables du CHU n’ont pas suffisamment fait pour lutter contre le trafic, les patients ne doivent pas pour autant subir des abus de pouvoir et des décisions profondément contre-productives.

De l’extérieur, cette intervention semble être un moyen de regagner la confiance d’un personnel alerté par une situation difficile qui le dépasse. Dans les faits, elle alimente la peur, inquiète, renforce le sentiment de marginalité parmi les patients, créé un climat de défiance à l’égard de ce même personnel de l’hôpital.

Elle donne enfin une image abjecte de la police nationale, qui, la veille de Noël se félicite sur Twitter d’avoir trouvé 7 grammes de cannabis dans la chambre d’un patient sans doute bien malade alors qu’elle a mobilisé un effectif conséquent.

Le coût d’une telle opération pour un résultat prévisionnellement catastrophique devait être pris en compte dans la boucle des décisions. Cette intervention des forces de l’ordre remet en cause notre pacte social, elle est grave, injustifiée, disproportionnée.

Nous demandons aux responsables politiques et syndicaux de prendre la mesure d’un tel acte : La Ville de Nantes, dans sa grande tradition d’ouverture, de raison et de sérieux ne devrait tolérer de tels actions injustifiées.

L’Hôpital Saint-Jacques fonde sa tradition sur l’accueil des citoyens en situation de marginalité, il trouve son utilité sociale en 1646 dans l’accueil des mendiants, vagabonds et de ceux que l’on appelait à l’époque les “aliénés”. Pour les 10 000 usagers que nous représentons, il était jusqu’à présent un espace de paix, de soins où chaque citoyen pouvait être reçu sans être jugé.

Cette intervention et l’inaction que nous déplorons mettent en cause l’objet même de ce lieu.

NORML France à l’initiative du Comité de Direction : Béchir Bouderbala (Délégué National à la Régulation), Alexandra Maillard (Directrice Administrative), Florent Buffière (Directeur de la communication), Olivier Hurel (Responsable des relations publiques). 

Le tweet de @PoliceNat44 en question :