Outre l’Uruguay, qui met en place un système de sevrage de l’addiction à la pasta base, une préparation cocaïnique, grâce à une substitution utilisant le cannabis, les retours d’expérience du Canada, d’Autriche, de Chine ou des États-Unis permettent d’esquisser ce qui semble bien être une nouvelle propriété découverte au cannabis : celle de se substituer à la consommation d’autres produits psychoactifs, alcool, médicaments ou autres stupéfiants.
Quelques diapositives extraites de plusieurs conférences ou ateliers du colloque international sur l’utilisation médicale du Cannabis, à Prague du 4 au 7 mars 2015.
Diapositive du Dr. Eberhard Pirich (Société Internationale de Recherche sur le Cannabis, Autriche) Diapositive du Dr Philippe Lucas (Tilray, Canada)
Selon les données recueillies par l’enquête CAMPS (Cannabis Access for Medical Purposes Survey) au Canada parmi les patients bénéficiant du programme médical gouvernemental, ce sont 84 % des personnes qui affirment que l’usage de cannabis médical remplace celui d’une autre substance. Pour 80% d’entre eux, le cannabis sert de médicament de substitution à la traditionnelle médication (ce que les anglophones appellent prescription drugs), généralement les anti-douleurs. Pour 52 %, le cannabis remplace l’alcool, et pour 32 % il remplace l’usage de drogues illicites autres que le cannabis.
Les patients citent en particulier, comme raison de la substitution à un produit par du cannabis ou des préparations à base de cannabis, une meilleure gestion des effets, ainsi que moins d’effets-secondaires négatifs. Il a également été noté une surreprésentation des personnes présentant un grand nombre de symptômes, ou des personnes de moins de 30 ans, parmi les patients ayant substitué la consommation d’un produit par du cannabis.
Substitution aux drogues illicites.
L’analyse des données montre que le cannabis a un potentiel de substitution en ce qui concerne le crack ou les préparations à base de cocaïne, les opiacés, la méthamphétamine. Il gagnerait donc à être mis en avant par les autorités sanitaires en tant qu’outil au sein de stratégies nationales de prévention des risques et de lutte contre la transmission des maladies infectieuses et les overdoses dûes aux substances précitées.
Substitution à l’alcool.
Il avait déjà été relaté a de nombreuses (Lucas 2013 ; Raiman 2006, 2009 ; Mikuriya 2004) que le cannabis pouvait représenter un substitut à l’alcool, voire un traitement à l’alcoolisme. L’étude CAMPS vient une nouvelle fois le confirmer. Il a aussi été dit que l’usage de cannabis, en tant que substitut à l’alcool, pouvait impacter de façon significative les taux de prévalence de l’alcoolisme, d’accidents de la circulation liés à l’ébriété, les violences ou attaques aux personnes. Désormais, c’est l’étude d’un an de régulation de la vente de cannabis destiné à l’usage adulte au Colorado qui vient confirmer ces études.
Substitution aux opiacés sur ordonnance.
Face à la hausse de la prescription d’opiacés et de dérivés morphiniques par les professionnels de santé dans la lutte contre la douleur, qui se sont exprimés par une explosion de l’addiction aux opiacés pharmaceutiques, ainsi qu’une mortalité et une morbidité induites très fortes, le cannabis semble représenter une alternative de substitution bien plus saine dans la lutte contre les douleurs chroniques.
.
On le voit donc, et Raphaël Mechoulam, découvreur du THC en 1964 et du système endocannabinoïde en 1994, nous le confirmait dans sa conférence sur l’histoire et les perspectives d’utilisations thérapeutiques des cannabinoïdes, en particulier pour l’alcool qui a déjà été étudié, le cannabis représente un outil pour la prise en charge des addictions, même les plus sévères (cocaïne, héroïne), et il s’agit maintenant d’intégrer les cannabinoïdes dans la palette de réponses de l’addictologie et de la réduction des risques.