COMMUNIQUÉ DE NORML FRANCE

Nous prenons acte du rapport réalisé par la Mission d’information visant la mise en place d’une amende forfaitaire relative à l’usage illicite de stupéfiants.

Nous remarquons la divergence d’opinion entre les deux rapporteurs. Les membres de notre association comprennent que l’hypothèse d’une amende forfaitaire délictuelle n’est pas écartée. Malgré plusieurs dizaines de textes adressés par nos partenaires et nous-mêmes aux Députés lors de la réalisation de ce rapport, l’interdit pénal est néanmoins maintenu. NORML France est favorable à la pérennisation d’un interdit moral pour les mineurs car les risques sont avérés ; mais l’interdit pénal n’a plus aucun sens, encore moins pour l’immense majorité des adultes qui consomment raisonnablement, il n’a plus aucun effet sur la consommation et a même tendance à la renforcer.

Aujourd’hui, il y a donc deux projets sur la table et deux rapporteurs qui soulignent chacun les obstacles irréductibles à l’application de la proposition de l’autre : Une amende forfaitaire délictuelle et une amende contraventionnelle. 

“Faute de grives, on mange des merles” comme le consacre le proverbe. S’il faut choisir nous préférons la contravention qui supprime la peine d’emprisonnement, mais les contraintes supplémentaires (prises d’empreintes, sanctions administratives, peines complémentaires) rendent le choix impossible. Mais à l’heure où le sujet émerge comme une question de santé publique, il ne faut pas faire moins mal que ce qui n’a jamais marché, il faut faire mieux, et donc aller vers de véritables politiques de régulation. C’est un fait aujourd’hui reconnu de la majorité des citoyens : la prohibition du cannabis est criminogène. Préférant le confort du status quo, les autorités restent aveugles devant les effets néfastes de leur politique auto-réalisatrice et en blâment son objet-cible, la substance illégale la plus “populaire” et la plus vendue, le cannabis.

Dès lors, que vaut cette proposition, qui ne règle rien au trafic, renvoie à une nouvelle « mission d’information » la réponse au problème de l’usage de stupéfiants par les mineurs et pour seule réponse sanitaire suggère d’inscrire sur l’avis d’amende forfaitaire des informations sur les structures sanitaires ?

Seule une modification de la loi pourra vraiment changer les choses. Dès lors que l’interdit pénal demeure, les mêmes causes produisant les mêmes conséquences, le système ne changera pas et l’échec du système répressif sera de nouveau constaté. Ce rapport est une commande politique pour asseoir un besoin de légitimer les tenants les plus extrêmes et les plus radicaux d’un système qui continue de marginaliser les plus pauvres, de persécuter les minorités et d’affaiblir les plus faibles.

Sur 87 pages de rapport, une seule occurrence est faite aux associations dites “d’usagers” englobées dans un même panier sans considération pour leurs différences, sans appréciation des différents arguments qu’elles ont pu apporter. Au-delà de cette simple référence, aucune remarque n’est faite aux arguments avancés par les associations d’usagers alors que les syndicats de police, les représentants du Ministère de l’Intérieur et les tenants d’une ligne conservatrice et aveugle sur le sujet sont sur-représentés.

Est-ce à dire que notre expression est invalide ? Est-ce à dire que nous avons le mauvais rôle et que nous n’aurions pas notre mot à dire ? Il est une chose d’auditionner des associations, il en est une autre de les entendre, d’écouter leurs arguments et de voir la raison quand elle se presse sur le pas de votre porte.

C’est bien de raison dont il s’agit, d’un bon sens politique et de sérieux dont nous parlons. Il n’y a pas, dans notre discours, quelconque idéologie politique, quelque défense d’intérêts particuliers. NORML France n’est pas un syndicat d’usagers, mais une organisation fondée sur l’intérêt général, qui a vocation à réunir l’ensemble des citoyens se sentant concernés pour réfléchir, se questionner, proposer et agir afin que nous puissions vivre en paix avec les drogues. Ne pas prendre en compte les arguments que nous avançons ou à tout le moins ne pas y répondre conduit inéluctablement à dévaloriser son propre travail qui se voit ainsi dépourvu d’une argumentation contraire.

L’association continuera de travailler avec les décideurs pour chercher à les convaincre du bien-fondé de ses positions. Ce rapport est une raison de plus pour que tous les citoyens en faveur de la régulation des drogues et du cannabis en particulier se réunissent afin de gagner leur place à la table des négociations.

Pour aller plus loin :