Chaque année, l’événement qu’elle organise consacre les vagues de l’actualité du marché du cannabis en Europe. Maria Olalla, c’est aussi un engagement réel et déterminé pour la régulation du cannabis en France et en Europe. Elle nous offre aujourd’hui une interview unique.

Quelle est votre rôle au sein d’Expogrow ?

Je suis la responsable de coordination d’Expogrow en France. Cela veut dire que je m’occupe de la déclinaison française du Salon laquelle, dans notre cas, inclut de nombreux domaines : la communication, les relations à la presse, la publicité, l’affichage… mais aussi les contacts avec les professionnels (growshops et entrepreneurs français), les associations, les leaders d’opinion ainsi que l’ensemble des personnes intéressées par le cannabis en France. De plus, je participe à la conception de la programmation de la Foire en proposant des artistes, des spécialistes, des intervenants français. Comme vous pouvez le voir quand on dit que “Expogrow c’est le salon français qui se fait en Espagne”, ce n’est pas juste un slogan… il y a beaucoup du contenu et du travail derrière.

Quelle est l’histoire de cette foire ?

Expogrow c’est l’histoire d’un rêve partagé entre les patrons de Plantasur et Positronics, les organisateurs du salon. En tant qu’entreprises exposants dans la plupart des Foires européennes, ils trouvaient que le modèle habituelle était très rigide. À savoir : des stands, du commerce, des produits et rien d’autre. À 20h, les portes se fermaient et chaque entreprise finissait par faire sa propre soirée quelque part. Ils rêvaient d’un événement musical, d’un Forum, des activités tout au long de la journée… pour le public mais aussi pour les exposants. Et le rêve est devenu réel en 2012, année à laquelle Expogrow a bouleversé le secteur au point que le reste des Salons se sont mis eux aussi à programmer du contenu. Nous sommes fiers d’avoir ouvert cette porte.

Comment vous êtes vous retrouvé sur ce projet ?

Ah… ça c’est vraiment drôle!! On peut dire que ce travail est venu me chercher en 2013 jusqu’à Bordeaux où j’habitais depuis 2005. Tout à fait par hasard (ou pas?), j’ai su que la boîte de production Wildpunk (Grenade, Espagne) cherchait un responsable des relations presse en France pour un événement sur Irun. Je connaissais bien Wildpunk de mon époque comme journaliste culturelle à Grenade, ma ville d’origine, donc je me suis mise en contact rapidement avec eux. Même sans savoir le contenu de l’événement, le poste paraissait fait à mesure pour moi… et quand j’ai appris qu’il s’agissait d’une Foire du cannabis, c’était la cerise sur le gâteau.

Cette année, Expogrow a décidée changer de dates, qu’est-ce qui vous a poussé à prendre cette décision ?

Depuis 2016, notre meilleure édition en termes d’afflux du public, nous avons expérimenté des difficultés pour attirer plus de monde (on parle ici du “client final” car en termes de présence professionnelle et des exposants nous n’avons pas arrêté de croître). Nous avons analysé les causes, évalué sur le fond notre performance et pris une décision risquée mais nécessaire pour l’évolution de la Foire : déplacer la date de septembre au mois d’avril en 2019.

Nous sommes convaincus que ce changement répond avec plus de justesse aux réalités concrètes du secteur : une date plus proche de la saison de culture en extérieur, un public plus nombreux et réceptif en nous avançant à l’époque de grande offre musicale et culturelle de l’été… Sans oublier un point essentiel : en septembre nous nous retrouvions en pleine rentrée. Les visiteurs potentiels n’avaient plus de congés et encore moins de budget. Et si à cela on ajoute que nombre d’entre nous ont des enfants et que c’est la rentrée des classes… Nous nous sommes rendu compte que septembre n’était vraiment pas la bonne date ! 

Qu’est-ce qui change dans cette nouvelle version ?

Nous avons pas mal de nouveautés pour cette nouvelle édition. Je ne peux pas tout dévoiler encore mais nous avons déjà annoncé quelques détails du changement de format : En premier lieu, nous allons dédier toute la journée du vendredi 26 avril aux échanges entre professionnels. En plus, ce jour-ci aura lieu le “Hemp Business Day”, le premier congrès de chanvre industriel et cbd du Sud de l’Europe. Le public sera invité à nous rejoindre durant le week-end où aura lieu le Festival de Musique (samedi 27), le Forum et les activités parallèles. Des changements pour nous améliorer mais sans cesser de renforcer notre savoir-faire : prendre soin des professionnels et fournir au public la meilleure expérience possible.

Quelle est l’ambition d’Expogrow sur le plus long terme ? Peut-on imaginer la mise en place d’une Foire cannabique en France ?

L’organisation d’Expogrow est toujours cyclique : on prépare à fond la prochaine édition, on vit à fond le déroulement du Salon, on analyse en profondeur le travail réalisé ainsi que les résultats… et l’on se lance à fond sur la suivante ! Nous sommes à la première étape de l’édition 2019, donc pas de vue plus lointaine que le mois d’avril 2019 pour l’instant. Bien sûr que nous pouvons (devons même) imaginer la mise en place d’une (ou plusieures) Foire(s) cannabique(s) en France… mais elles ne seront pas organisées par Expogrow.

Que pensez-vous de la situation actuellement dans notre pays ?

Je crois que nous sommes face à une période charnière de l’évolution des mœurs en France. Quand j’ai commencé à travailler pour ce secteur (il y a huit ans), le mot « cannabis » était banni de la presse, des publicités et même des débats publics… Aujourd’hui on assiste au phénomène contraire : le sujet est évoqué quotidiennement dans les médias français. Cela prouve que finalement les décideurs commencent à saisir la problématique. A ce titre, nous ne sommes plus très loin de la légalisation du cannabis médical en France et cela paraissait presque impossible il y a cinq ans. Il y a enfin de l’espoir pour les malades et l’opportunité de suivre pour le cannabis social. Espérons que cela finisse de se concrétiser dans les mois qui viennent !

Le contexte européen nous semble favorable, que pensez-vous des évolutions actuelles ?

À mon avis, la difficulté principale d’une future légalisation c’est justement que chaque pays européen s’est emparé du sujet à sa façon… Ce qui est légal en Suisse ne l’est pas en France ou en Espagne. Mais les produits n’ont plus de frontières avec internet et ce manque de clarté nuit sur le consommateur devenu criminel souvent par manque de connaissance des lois. Dans tous les cas, en Europe il y a toujours eu différentes vitesses et au sujet du cannabis il ne pouvait pas être autrement.

Nous avons beaucoup de Français qui aimeraient émigrer, quelle serait selon vous la destination cannabinophile du moment ?

Je crois que l’on a tendance à oublier un continent quand on parle du cannabis: l’Amérique du Sud. Les États-Unis, le Canada… ok, ça peut faire rêver mais c’est l’Uruguay le premier pays au monde qui a marché vers la régulation complète. Moi, perso, j’ai hâte d’y aller et voir comme cela se développe.

Quel est votre message pour la communauté française aujourd’hui ?

Mon message est simple: si l’on veut voir le cannabis sortir de l’illégalité il va falloir que “la communauté” soit unie, s’entraide, se donne de la force et se présente de manière “commune”… Cela n’a pas été le cas auparavant mais je suis une optimiste incurable et j’ai de l’espoir sur les nouvelles générations qui sont à la tête de la lutte actuellement. NORML France est un excellent exemple de ce changement de paradigme. Longue vie à vous !