C’est quoi, précisément, le « Craft Cannabis » ?
Article original d’Alana Armstrong, Canada, 17 mai 2017

Pendant longtemps, on avait aucune idée d’où venait notre herbe et encore moins de quelle manière ou par qui elle avait été cultivée. Le « Craft Cannabis » (ndt: que l’on pourrait traduire par « cannabis artisanal d’exception ») a toujours existé, et au fur et à mesure que les consommateurs deviennent plus informés et plus connaisseurs, cette pratique a gagné en popularité. Alors que les autres produits de consommation artisanaux ont décollé, des micro-brasseries locales aux pains ou cafés artisanaux, les produits « du producteur à l’assiette » sont élégamment représentés avec ce type de cannabis.

Le « Craft Cannabis » implique principalement davantage de patience, de soins et d’attention pendant la culture, la récolte et la maturation (curing) de la plante, mais il peut aussi inclure les caractéristiques suivantes :

Cannabis artisan

Un cannabis d’artisan, c’est un chanvre bio, cultivé de façon raisonnée, ce qui en fait un produit d’une qualité unique.

  • Manucure à la main, sans machine, pour conserver les trichomes et le potentiel des cannabinoïdes intact ;
  • Culture bio, c’est à dire sans pesticides (insecticides, fongicides, herbicides, parasiticides…) ;
  • Soleil naturel plutôt que lumière artificielle ;
  • Contenant en verre de qualité anti-UV ou papier (note du traducteur: les sachets en polyéthylène sont chargés d’électricité statique qui attire les trichomes et sont néfastes pour la conservation et l’emballage).  

Socialement et économiquement, le « Craft Cannabis » représente bien plus. Les petites productions favorisent le lien entre les consommateurs, les producteurs et les produits, ainsi que les pratiques basées sur la qualité et les solutions médicales individualisées. Des commerces locaux prospères stimulent les économies sociales régionales, ce qui signifie que ces petites entreprises pourraient renforcer la communauté entière, créant de l’emploi et de substantielles taxes, ce qui ferait du « Craft Cannabis » un outil de soutien et de diversification de l’économie.

L’industrie du cannabis est déjà concurrentielle et plus saturée chaque jour (ndt: au Canada), et donc quelle meilleure option que de s’orienter vers une production, mais d’un genre particulier, qui transforme le produit en quelque chose de spécial. Ce qui voudrait dire des produits de haute qualité, un plus grand choix et le soutien de l’économie locale en circuit court.

La  génération « millenium » (les enfants du millénaire), avec sa recherche des expériences et  produits convenant le mieux à son éthique et à son identité, pourrait être un facteur de croissance du secteur du cannabis artisanal. Mais l’essor de ce secteur pourrait aussi intéresser un nombre croissant de consommateurs de cannabis plus âgés cherchant des produits haut-de-gamme pour des occasions spéciales ou des utilisations thérapeutiques précises.

Jusqu’à présent, le Triangle d’Émeraude (« Emerald Triangle » en anglais, une région boisée formée par les trois comtés de Mendocino, Humboldt et Trinity dans le nord de la Californie), était la principale région du Craft Cannabis nord-américain. Mais le Canada possède plusieurs régions au potentiel considérable qui pourraient devenir de futures régions de cet artisanat. Désormais, certains gros producteurs de cannabis médical ayant une licence créent même leur propre marque de cannabis artisanal.

Citons des producteurs comme Canopy Growth, dont le patron Bruce Linton présente la culture artisanale en disant: « Notre compagnie reconnaît les besoins diversifiés des patients, et elle est fière de leur apporter la plus haute qualité cultivée dans nos propres installations, mais aussi de leur présenter des producteurs qui proposent, chacun, une offre unique. Les cultivateurs de cannabis, grands et petits, sont chacun essentiels pour un marché du cannabis médical sain et prospère. ».

Le petit mot du bureau :

Cet article nous démontre bien l’importance de mettre en place une régulation prenant en compte tous les types de cultures du chanvre, en particulier de laisser une grosse place à un cadre légal permettant de produire un « craft cannabis ».

Cela passera par la mise en place de nombreuses licences d’exploitation, on pourra ainsi miser sur une multiplicité de petits espaces de production, de préférence en extérieur (sous serre et en pleine terre), privilégiant la qualité à la quantité tout en ne se basant pas qu’uniquement sur des variétés hautement titrée en THC. 

Un cannabis d’artisan, c’est aussi passer par l’utilisation de cultivars plus équilibrés, consommant peu d’eau et acclimatés à leur zone de production, qui privilégient les semences libres et régulières (non-féminisées), qui respectent l’environnement tout en étant produits avec un bilan carbone proche de zéro.  

La France, avec ses DOM-TOM, est le deuxième territoire au monde possédant une diversité des sols et des micro-climats la plus complexe après Madagascar. Ce n’est pas pour rien que nous sommes un pays de terroirs pour nos vins, fromages et autres spécialités culinaires. Pour établir un parallèle avec une activité bien française, on peut prendre pour exemple les petits domaines viticoles qui se sont spécialisés en agriculture biologique ou en biodynamie. Ces derniers se sont multipliés grandement ces dernières années; en misant sur la qualité, le respect de l’environnement et l’innovation, ces exploitations ont su rester attractives et compétitives sur le plan de la concurrence internationale. 

Alors le « Craft Cannabis » made in France, c’est pour bientôt? Pas si sûr… En tous cas, nombre de passionnés n’ont pas attendu un changement du cadre législatif pour s’adonner à leur passion. Ces artisans du cannabis bio opèrent déjà illégalement, au risque de tout perdre; travaillant leurs variétés et leurs process pour que bientôt, qui sait, ils puissent être reconnus pour leurs compétences, si difficilement acquises du fait du placement sous contrôle international de leur plante préférée. 

Pour aller plus loin : 

Crédit photos illustration de l’article  : © Maurice Narcozy