C’est sans doute l’une des principales leçons à tirer de cette dernière enquête ESCAPAD. Même si nous vous le concédons, c’est un peu vite dit !
Les enquêtes ESCAPAD ont été mise en place à partir de l’année 2000 par l’Observatoire Français des drogues et des toxicomanies (OFDT) en partenariat avec la Direction du service national (DSN). Elles consistent en une étude, scientifiquement neutre ayant vocation à interroger un échantillon de jeunes de 17 ans.
Pour 2017, l’étude a interrogé plus de 46 000 citoyens qui ont répondu à un questionnaire anonyme. Il s’agit d’un nombre record qui permet de renforcer le caractère représentatif de cette étude. Néanmoins, cette étude n’est pas réalisée sur le fondement d’une méthode statistiquement représentative. Il convient donc de la voir comme un moyen de comprendre le mouvement général des consommations.
Un taux d’expérimentation le plus bas jamais enregistré dans cette enquête, l’âge moyen de la primo-consommation reste stable
En 2000, 45,6% des jeunes interrogés avaient expérimenté le cannabis. En 2017, il sont 39,1%. On constate une dynamique en vagues : de 2000 à 2005, on observe une augmentation progressive de la consommation. Elle atteint à l’époque un pic (50,5%) pour descendre progressivement jusqu’en en 2011 (41,5%). On peut donc dire que les jeunes de 17 ans expérimentent moins le cannabis que par le passé. En tout état de cause, ce nombre de 39,1% consacre le taux le plus bas depuis près de vingt ans. Pour autant, l’age moyen de la première expérimentation est resté stable (un peu plus de 15 ans).
Ce chiffre de 39% pourrait également ‘expliquer en partie par la banalisation du cannabis, terme mal compris connoté trop souvent péjorativement, alors qu il traduit en réalité un phénomène doublement positif : l’inscription culturelle du chanvre dans notre société. D’un coté, la volonté de braver l’interdit est réduite ; de l’autre, les parents mieux informés en parlent davantage avec leurs enfants,
Ce chiffre semble en grande partie liée à la réduction du tabagisme puisque que l’on observe nettement une superposition des courbes, Le tabagisme serait un mode d’entrée dans l’usage de chanvre, en lien avec le mode de consommation (cigarette de chanvre et tabac). Le développement des bonnes pratiques de l’usage de cannabis (vaporisation et usage sans tabac) chez les adolescents devraient progressivement décorreler ses 2 variables. En attendant, lutter contre le tabagisme, et in fine contre la combustion, semble être un bon moyen de faire reculer la consommation de chanvre chez les jeunes.
Enfin, cette baisse de l’expérimentation pourrait aussi être issue d’une augmentation progressive de la prévention, notamment de la part des pairs et par une adaptation du système judiciaire vers des peines de moins en moins pénalisante et de plus en plus pédagogique.
Un usage des jeunes de moins en moins fréquent
Comme le démontre l’étude, l’usage dans l’année a tendance à diminuer (de 38% à 2002 à 31% en 2017). C’est à dire qu’il y a moins d’un adolescent sur trois qui a consommé du cannabis dans les douze mois écoulés.
Dans le même temps, l’usage régulier baisse lui aussi, dans des proportions plus significatives. En effet, nous passons de 9,2% à 7,2% (-21% environ). On fera remarquer ici que les jeunes hommes sont deux fois plus nombreux à consommer du cannabis de manière régulière (au moins dix fois par mois) que les jeunes femmes.
Le cannabis facilement disponible : Un environnement propice à l’approvisionnement
L’une des informations essentielles de l’enquête réside dans le mode d’approvisionnement. En effet, dans leur grande majorité (69,8%), « les usagers dans le mois disent obtenir leur cannabis gratuitement, par le biais de dons ou de consommations partagées ». Lorsqu’ils l’achètent, c’est principalement (5’7,9%) dans le réseau d’ami ou de proche, bien souvent au sein des établissements scolaires.
Ceci constitue un obstacle à la réduction de l’usage qui ne saurait être réglé par une quelconque transformation de la législation mais par un véritable travail d’information et de prévention. L’enquête nous enseigne donc que la principale source d’expérimentation est liée à un environnement propice à l’approvisionnement. Dans le même temps, il est utile de préciser que l’autoculture (4,9%) ou la commande sur Internet (1,4%) demeurent marginales parmi les usagers réguliers.
L’analyse de l’Office français des drogues et des toxicomanies précise que les modes d’approvisionnement dépendent de la fréquence de consommation. Ainsi, plus on consomme, et plus la part de l’achat est importante.
Un tiers des adolescents interrogés qui déclarent être des usagers annuel ne fument que par le biais du partage et du don. Dans le même temps, un quart d’entre eux ne s’approvisionne que par l’achat. Il serait en ce sens pertinent d’étudier les raisons de ces achats, et nous formons l’hypothèse que les consommations exceptionnelles (une fois par an) sont liées à un environnement festif qui, pour cette fréquence ne nous apparaît pas comme problématique.
La nécessité de prévenir et de faire de la réduction des risques : un nombre important d’usagers à risque
La part des usages problématiques en population adulte est de l’ordre de 5 à 10% en fonction des pays. Pour les usagers mineurs et les plus jeunes, l’enquête démontre qu’un usager sur quatre présenterait un risque élevé d’usage problématique. C’est l’un des facteurs qui augmente continuellement depuis 2000.
Si l’enquête nous rassure quant au pourcentage d’adolescents de 17 ans qui seraient susceptibles de présenter un risque élevé d’usage problématique de cannabis (7,4%), l’importance de l’effort sur la prévention doit se concentrer sur le recul de l’age de l’expérimentation et les mesures de réductions des risques appropriées sont également nécessaires chez les usagers de moins de 18 ans, ce qui n’est toujours pas clairement encadré par la loi.
L’enquête fait aussi remarquer que la proportion d’usagers réguliers de cannabis est plus de deux fois plus importante chez les apprentis (14,3%) que chez les élèves (6%) et plus de trois fois plus importante chez les jeunes sortis du système scolaire (21,1%), ce qui invite a porter encore davantage le regard sur l’environnement de nos jeunes.
La principale leçon à retenir de cette enquête
Dans la conception de notre prochaine campagne, nous intégrerons donc un volet spécifiquement dédié aux bonnes pratiques d’usages, notamment liée aux produit, aux modes de consommation (la combustion restant très largement en tête), à la fréquence de cette consommation (afin de donner des outils pour mieux calibrer la consommation à travers la mise en place d’une éventuelle application à ce sujet).
Nous élaborerons une stratégie en conséquence afin qu’elle vise un peu plus sensiblement les apprentis et les adolescents sortis du système scolaire. Bien que leur proportion soit plus élevée que dans le reste de la population interrogée, il faut rappeler qu’ils sont bien moins nombreux. Ainsi, nous pensons que les usagers à risque qui nécessitent une véritable prévention sont établis dans une fourchette située entre 45 000 et 55 000 usagers annuels.
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