Mercredi 23 juin dernier, la Cour de Cassation de a rendu un arrêt attendu par toute la filière française du CBD, entérinant la légalité de la vente de cette substance sur le territoire national.
Les institutions judiciaires à saluer
Nous ne pouvons que saluer cette décision de la plus haute juridiction française qui vient mettre fin à une longue période d’incertitude pour les acteurs de la filière. Cet arrêt « à portée générale » autorise donc la vente de CBD en France, à partir du moment où ce dernier est produit au sein de l’espace européen.
La position de la Cour de Cassation s’inscrit dans une suite de verdicts juridiques allant dans le sens de la filière CBD, l’arrêt du 23 juin suivant la décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne sur le sujet. En outre, la justice française s’était déjà prononcée en faveur de la réouverture d’une boutique CBD de Dijon le 15 juin dernier. Chacun peut donc constater qu’au niveau juridique, la logique est à l’acceptation de cette molécule.
Soutenant toute législation claire et pragmatique encadrant la distribution et l’usage des produits du Chanvre, nous nous félicitons donc de la dynamique qui semble être présente au sein de nos institutions judiciaires et espérons que les décideurs publics sauront prendre exemple sur celles-ci.
L’accès aux produits CBD n’est pas seulement une opportunité économique, il revêt également une dimension sanitaire. L’autorisation de la vente de produits CBD est un enjeu qui va bien au-delà de l’activité économique des quelques 300 commerces français impliqués dans ce secteur. Effectivement, un accès facilité à des produits à la qualité contrôlée permettrait à des citoyens, pouvant être confrontés à une consommation à risque de produits dosés en THC, de trouver des palliatifs efficaces permettant de sortir de ces mêmes consommations problématiques.
Quelle est la portée de ces décisions ?
Sur le cadre législatif :
La décision de la cour de cassation dans l’affaire du commerce dijonnais entérine l’arrêté du 19 novembre 2020 de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE-Kanavape) qui ne considérait pas les produits contenant du CBD comme étant des stupéfiants, et donc que la position française en la matière est contraire au droit européen. De fait, la seule présence de THC (jusqu’à 0,2%) dans ces produits, n’est pas suffisante pour les considérer comme des stupéfiants.
Avec cette décision de la CJUE, les fondements de la législation sur le cannabis à usage industriel et bien-être ne peuvent donc plus s’appuyer sur la législation sur les stupéfiants.
Le gouvernement, qui devait légiférer sur le statut des produits CBD et probablement interdire la commercialisation de la forme végétale, pourrait être contraint de réguler la vente de fleurs produites en Europe et distribuées sur le sol français.
Sur la commercialisation des fleurs de chanvre :
La décision du 23 juin revient sur la vente de produits CBD, dont les fleurs ou plus exactement les “infrutescences parthénocarpiques” contenant jusqu’à 0,2% de THC. Elles ne peuvent être considérées comme des stupéfiants et dès lors, au nom de la libre circulation des biens dans l’Union Européenne, peuvent être commercialisées en France.
À l’heure actuelle, la vente est donc autorisée pour les fleurs provenant d’un pays issu de l’UE. En revanche, en France, la production de la fleur reste pour le moment interdite : un producteur de chanvre ne peut pas utiliser ses fleurs et donc, les vendre.
Cette position crée clairement une rupture d’égalité pour les producteurs de chanvre français, et le gouvernement pourrait être amené à reconsidérer son positionnement sous la pression économique que cela représente.
Comme tous les autres acteurs du cannabis français, nous aspirons toujours à une législation claire au sein d’un environnement sain pour les professionnels comme pour les consommateurs sur les questions de production et de distribution des fleurs de chanvre sur notre territoire. Nous espérons que la réécriture de l’arrêt de 90 à venir aille dans le bon sens et que le législateur saura mettre à profit toutes les dernières décisions juridiques émaillant l’actualité internationale récente.
En termes de répression policière
Plus encore que simplement la question de la fleur, cette décision et la possible régulation de la vente de fleurs CBD ne seront pas sans conséquence sur la politique répressive des pouvoirs publics à l’encontre des usagers de cannabis riche en THC : la police pourrait être contrainte de devoir réaliser des tests sur les produits saisis lors des contrôles pour pouvoir déterminer s’il s’agit de stupéfiants ou non.
Sur l’usage des stupéfiants au volant
Plus encore, la légalité des produits CBD contenant des traces de THC remet en question les tests salivaires dans le cadre des contrôles routiers. Des affaires récentes l’ont prouvé, les tests salivaires peuvent réagir positivement suite à la consommation de produits CBD vendus légalement. Il sera donc nécessaire de déterminer de nouvelles règles pour prouver que la positivité du test vient bien de l’usage d’un produit considéré comme stupéfiant.
Droit Européen et circulation des produits CBD
Attention toutefois, il s’agit d’une réglementation européenne et cela appelle à la vigilance : les produits CBD qui ne viennent pas de l’UE ne sont donc pas visés, comme par exemple les produits provenant de Suisse.
Ce que dit cette décision, c’est qu’il faut que les produits aient été produits au sein de l’Union Européenne. Cependant, certains cabinets avancent déjà que la situation serait identique pour des produits qui ont été légalement commercialisés au sein de l’UE. Cette analyse n’a pas fait l’objet d’une décision confirmant cette position même si dans les faits cette pratique est déjà courante chez les professionnels du secteur.
Aussi, concernant les possibles évolutions de la législation en République Tchèque par exemple, où la limite de THC dans le chanvre pourrait être relevée à 1%, les fleurs qui y seront produites ne pourront être vendues dans l’UE. Ce qui ici fait foi, c’est encore une fois le droit européen qui respecte 0,2% de THC. Au-delà, les produits n’ont pas le droit de circuler.
Retrouvez l’intégralité du live sur notre chaine Youtube :
Timecode :
02:36 – Laurent et Ludovic présentent le cas “The Pot Company”
09:00 – Me Nicaud, rappel CJUE + Arrêt Dijon
11:40 – Une excellente décision selon R. Colson
14:38 – RC. Une répression actuelle absurde qui va devenir grotesque
15:22 – La production des fleurs en France
16:40 – Me Nicaud – Test salivaire et usage de CBD.
23:38 – R. Colson – L’UE au secours de la france
28:20 – Me Nicaud – Droit Européen et CBD
29:33 – R. Colson – Rep. Tchèque et chanvre à 1% de THC
32:38 – Me Gavignet – Sa vision du cas The Pot Company
39:35 – Me Nicaud : les autorités doivent prouver que c’est un stupéfiant
38:32 – Fleurs de chanvre légales & risque de répression policière
40:30 – Conduite, Tests Salivaires et CBD
42:00 – Quelle voie pour les Chanvriers français?
47:50 – Que peut faire le gouvernement?
52:02 – The Pot Company : quelles suites?
53:50 – La pression économique et la question de l’importation
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Pour aller plus loin :
- 23/06/21 Le Figaro : Cannabis : la Cour de cassation autorise la commercialisation de CBD
- 23/06/21 France Bleu : La France ne peut pas interdire la vente de CBD, s’il est produit légalement dans un autre État membre de l’UE
Merci pour cet article qui résume bien la situation. Pour la législation sur les fleurs, est ce que la loi ne risque pas de changer à nouveau ? Il est assez absurde de devoir importer des fleurs qui viennent d’autres pays européens.